Comme nombre d'entre vous, je n'employais pas jusqu'à présent cette "orthographe réformée". Je me disais que j'allais sagement me cantonner (et me cramponner ?) à mon statut de "correctrice de la vieille école".
D'autant plus que j'ai dû en faire, autrefois, des lignes et des lignes "post-dictée" du genre : je recopie trente fois le mot "événement" avec deux accents aigus et le verbe "paraître" avec un accent circonflexe. Flûte, on ne va tout de même pas "me" chambouler tout ça maintenant, après le mal que je me suis donné dans mon enfance !
Néanmoins, me trouvant confrontée il y a quelques mois à la correction d'un petit ouvrage destiné aux enfants (à qui l'on enseigne ladite orthographe réformée...), je me posai la question et la posai à l'éditeur, lequel, pourtant spécialisé, n'y avait pas pensé, bien sûr ! Il me répondit, après mûre réflexion, d'utiliser l'orthographe réformée, chose que je fis, quoique à contrecœur... Savez-vous ce qu'il advint ? Quelques jours après avoir reçu le fichier corrigé, il me demanda de revenir en arrière ! Quel ne fut pas alors mon "ouf !" de soulagement !
Toutefois, le problème restait posé : que faire quand l'ouvrage est destiné à un jeune public ?
Et voilà qu'il se pose de nouveau aujourd'hui, non pas sur un petit livre destiné aux enfants, mais sur deux ouvrages bien plus "consistants", deux manuels destinés à l'enseignement du français au collège. L'ennui, c'est que l'éditeur (un autre), sans trop se poser de questions, me demande dans son courrier de commande d'uniformiser en utilisant l'orthographe réformée... Qu'à cela ne tienne, je peux comprendre. Le cas est particulier, ces manuels s'adressent à des enfants de onze ou douze ans. Ils ont déjà du mal à lire et écrire, on ne va pas leur "embrouiller" le cerveau avec une orthographe différente de celle qu'on leur enseigne... Pauvres choux !
Premier manuel, premier écueil : deux cent cinquante pages bien pleines. Fichtre ! ça promet du sport ! Effectivement, cette uniformisation est une tâche assez ardue et pénible, surtout quand on n'est pas habitué à ce genre d'exercice et que, comme moi, on se refuse en général à appliquer l'orthographe rectifiée.
(...)
Premier ouvrage terminé. Quelle suée !
Et voilà qu'arrive le second manuel, comptant également deux cent cinquante pages. Je crois alors pouvoir souffler un peu puisqu'il s'agit de corriger des textes de référence extraits d'ouvrages déjà publiés. À part quelques fautes de frappe, je ne devrais pas trouver grand-chose...




Je vais aboutir à un livre rédigé moitié comme ci, moitié comme ça. Les gamins vont y perdre... le peu de français qu'ils ont.
L'éditeur, interrogé par courriel, se révèle avoir pris quelques jours de congé... C'est gentil de me laisser "dans mon bain" !
Me voilà bien ennuyée. Je me contente donc de surligner en vert fluo les innombrables mots concernés, tant dans un sens (orthographique) que dans l'autre. L'auteur et l'éditeur trancheront et je passerai pour une sacrée emm...
Avouez tout de même que c'est une situation pénible, notamment quand on sait que l'éditeur, qui n'y connaît rien en matière de temps de correction, rechignera à payer les heures que ce type de travail supplémentaire requiert.
Que ne se sont-ils cassé une jambe, nos chenus académiciens, je jour où, s'ennuyant ferme, ils ont renoncé à la belote pour se mêler de nous mettre de tels bâtons (à moins que ce ne soit batons ?) dans les roues !
Et vous, en pareil cas, que feriez-vous ?